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La dimension humaine primordiale de l’agriculture régénératrice

Décryptages

Reforest’Action conçoit et développe des projets d’agriculture régénératrice aux multiples bénéfices pour l’environnement et les hommes. Convaincue que les entreprises peuvent être sources de régénération du Vivant, nous souhaitons contribuer à leur transformation grâce à des solutions fondées sur la nature, dont l’agroforesterie. Que ce soit en régions tempérées ou tropicales, les communautés agricoles constituent les fondations de notre démarche. Elles sont intégrées dès les étapes de conception du projet, lors desquelles leur avis est pris en compte dans le design des travaux, et deviennent ensuite les garantes de la bonne mise en œuvre des leviers choisis sur le terrain, en toute autonomie. Les impacts positifs de l’agriculture régénératrice dépassent les piliers environnementaux et de production : les leviers actionnés revêtent une dimension socio-économique majeure qui a un impact direct sur la qualité de vie des producteurs bénéficiaires.

L’implication des parties prenantes : une démarche anthropique

L’agriculture régénératrice affiche une ambition qui peut sembler paradoxale : rendre les pratiques agricoles compatibles avec les limites planétaires, sans bouleverser (ou le moins possible) les dynamiques techniques, économiques et sociales en place. Comme le mentionne Jean-Christophe, Project Manager en charge des projets d’agriculture régénératrice en zone tropicale chez Reforest’Action, « notre schéma doit pouvoir s’intégrer dans un système de production qui implique de la gestion et des équipes. Elles-mêmes ont des conditions de travail et des perceptions du milieu agricole qu’il faut prendre en compte. » Dès le départ, les dynamiques humaines constituent la base de notre approche et sont intégrées aux différents diagnostics et propositions : « l’étude de faisabilité commence par ce premier levier important, un levier anthropique. On ne fait pas un projet d’agriculture régénératrice de façon théorique et isolée, car cela implique des gens », corrobore Jean-Christophe.

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Travailleuses agricoles dans un champ de fleurs à parfum durant la période de récolte, Maroc
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La collaboration : une condition préalable de l’agriculture régénératrice

« L’agriculture est une science sociale avancée. Elle concerne un grand nombre de parties prenantes à l’échelle du territoire, de la région et même, du pays. Il pourrait sembler que les étapes de collaboration sont les plus simples, car moins techniques, mais elles sont en fait les plus complexes car elles sont à la base de tout », clarifie Jean-Christophe. Les changements suscités par l’adoption de pratiques régénératrices doivent donc être discutés en amont et à plusieurs niveaux, dans le cadre d’un processus collaboratif qui vise à garantir l’adaptabilité et l’acceptabilité des leviers envisagés. Les principaux acteurs inclus dans les projets sont :

  • L’entreprise contributrice : il s’agit de l’entreprise qui fait appel à Reforest’Action pour accompagner son fournisseur vers la durabilité de son exploitation, lui permettant ainsi de sécuriser un approvisionnement donné ou d’améliorer la qualité de sa production.

  • Les équipes agricoles et les communautés locales : l’exploitation agricole, fournisseur de matières premières et porteur du projet sur le terrain, se compose d’une force de travail qui doit être consultée dès les étapes préparatoires et bénéficiera directement du projet. Les communautés locales et habitants de la zone de production représentent une partie des bénéficiaires indirects.

    En zones tropicales, les communautés agricoles, pour lesquelles l’agriculture est souvent le seul moyen de subsistance, sont des acteurs clés des projets d’agriculture régénératrice. Tel un véritable fil rouge, elles sont mobilisées tout au long du projet : du choix des leviers à actionner au monitoring des arbres plantés, en passant par la réalisation des travaux au sein des terres qu’elles exploitent. Les populations agricoles sont les mieux placées pour juger de la pertinence de l’implantation de nouvelles pratiques, en plus d’être les garantes de leur bon déroulement à long terme.

    En zones tempérées, les enjeux sont catalysés par une crise agricole provoquée notamment par le faible niveau de revenu des exploitants et la forte baisse du nombre d’agriculteurs. Dans ce contexte, les projets menés par Reforest’Action placent les agriculteurs au centre de la démarche en les consultant dès l’étude de faisabilité. Ils sont ensuite accompagnés et formés au changement de pratiques lors d’ateliers et d’animations de groupe. Dans une volonté d’amélioration continue, nous restons attentifs à leurs recommandations pendant toute la mise en œuvre du projet.

  • Les autorités : il peut s’agir de conseils régionaux, de bureaux, de représentants des gouvernements locaux et nationaux ou encore d’institutions publiques diverses.

  • Les partenaires locaux ou internationaux : les projets d’agriculture régénératrice étant techniquement complexes, Reforest’Action s’associe à divers partenaires techniques, experts de l’agronomie, pour concevoir des projets à la hauteur des enjeux.

La gouvernance de chaque projet est incluse dans l’étude de faisabilité, afin d’identifier le rôle de chaque entité de manière claire et transparente, et de garantir une collaboration fluide pendant les phases suivantes. « On entre ensuite dans une logique de proposition, de contre-proposition et d’adaptation », poursuit Jean-Christophe.

La vitiforesterie : s’adapter aux contraintes d’un secteur exigeant

La vitiforesterie est une branche de l’agriculture régénératrice qui a pour principe d'associer viticulture et sylviculture. Elle est développée par Reforest’Action dans plusieurs régions de France : Bordelais, Cognaçais ou encore, en Champagne. Consistant à planter des arbres au sein d’un système agricole très codifié et sur un foncier de haute valeur, cette discipline illustre parfaitement le besoin essentiel de collaboration. De ce fait, la conception des projets de vitiforesterie doit se faire en concertation avec la direction et les équipes techniques du vignoble. Il y a de nombreuses contraintes à respecter, que ce soit sur le plan opérationnel, d’un point de vue paysager ou pour des questions de réglementations liées à une appellation. La plus-value de tels projets réside dans leur capacité à intégrer ces contraintes et à maintenir l’équilibre entre une viticulture productive et génératrice d’impacts positifs sur le Vivant. Marie est Project Manager chez Reforest’Action et supervise le développement de nos projets d’agriculture régénératrice en zones tempérées, dont le volet vitiforestier. Pour elle, le dialogue avec les équipes du vignoble est essentiel : « nous entretenons une relation étroite avec elles, ne serait-ce que pour la prise en compte des éléments techniques, tels que la mécanisation des activités, dans la conception du projet. Ces paramètres sont essentiels si l’on veut que le design colle à la réalité du terrain. »

Reforest’Action développe un projet de vitiforesterie pour son client, la Maison Ruinart, au cœur du vignoble de Champagne qui se déploie sur cinq départements du Grand Est, dont la Marne en majorité. Au sud de Reims, dans une campagne vallonnée, la commune de Taissy accueille un des vignobles emblématiques de la Maison. Implanté depuis 1733, le vignoble de Taissy, classé Premier Cru, s’étend sur quarante hectares de terre et se compose principalement de chardonnay âgé de 6 à 18 ans. Depuis 2021, c’est sur ce terroir d’exception que Reforest’Action déploie un projet d’agriculture régénératrice ambitieux, avec pour objectif principal l’augmentation de la résilience des vignes face au changement climatique et l’accueil de la biodiversité. Chaque nouvelle année signifie le démarrage d’une nouvelle phase de plantation, réalisée en étroite collaboration entre les équipes de terrain de Reforest’Action et celles de la Maison Ruinart. Cette démarche de fond, qui se veut expérimentale et évolutive, a déjà permis la conception et la plantation de plus de 14 200 arbres via des implantations agroforestières diversifiées. Depuis 2023, la volonté de la Maison Ruinart de promouvoir une viticulture durable s’est encore renforcée, lorsqu’elle a décidé d’apporter un soutien financier à d’autres viticulteurs de la région. Via la création de partenariats durables, trois autres vignerons du vignoble de Champagne ont déjà accepté cette main tendue et ont collaboré avec Reforest’Action dans la conception et la mise en œuvre d’implantations vitiforestières sur leurs terres. Le modèle se répand.

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Plantation d'arbres en agroforesterie sur la parcelle viticole de Taissy

Les leviers socio-économiques

Notre approche avec les agriculteurs est résolument collaborative et la réciprocité dans les apprentissages et l’optimisation du projet est une composante essentielle de notre action. C’est pourquoi les projets d’agriculture régénératrice que nous menons incluent une dimension socio-économique primordiale. Cette dernière se traduit par l’activation de leviers dédiés à l’autonomisation des populations agricoles et à l’amélioration de leurs conditions de vie.

Le rôle central des agriculteurs dans la mise en œuvre des projets

Le GIEC définit la notion d’adaptation communautaire comme « la promotion de la capacité d'adaptation de groupes de population auxquels on donne les moyens d'agir. » Chez Reforest’Action, nous travaillons main dans la main avec les producteurs et les entreprises, de la conception à la mise en œuvre des projets. Nous sommes convaincus que la pérennité d’un projet réside dans l’accompagnement des agriculteurs à la réalisation autonome des activités. Si Reforest’Action reste le maître d’ouvrage des projets que nous développons, les travaux sylvicoles et agronomiques sont menés par les producteurs eux-mêmes. C’est pourquoi leur bon déroulement doit passer par des opérations de formation et de renforcement des capacités sur le terrain.

En zones tempérées, notre démarche inclut l’animation de groupes d’agriculteurs sous la forme d’ateliers. Un suivi technique est ensuite fourni pour leur permettre d’assurer le monitoring du projet dans la durée. Nos équipes techniques effectuent également des consultations régulières avec les producteurs dans une démarche d’amélioration continue.

En zones tropicales, les enjeux environnementaux étant fortement corrélés aux problématiques socio-économiques, l’inclusion des communautés agricoles doit être abordée sous le prisme de la sensibilisation. Dans ces régions, la déforestation précède quasi systématiquement l’établissement de zones agricoles. Il s’agit donc avant tout d’expliquer en quoi l’adoption de pratiques durables permet l’amélioration des conditions de vie humaines sans aller de pair avec la destruction des écosystèmes naturels. Par la suite, les ressources et outils nécessaires au démarrage des activités sont fournis aux agriculteurs locaux. Leur formation technique est également assurée par le partenaire local, souvent via la mise en place de parcelles de démonstration et parfois même via la création d’une école dédiée.

L’impact socio-économique positif des projets d’agriculture régénératrice

Améliorer leur chaîne de valeur est également une opportunité pour les entreprises d’aller au-delà de l’objectif initial de pérennisation de leurs approvisionnements. En choisissant un modèle de production agricole vertueux, elles ont la possibilité de promouvoir la génération d’impacts environnementaux et socio-économiques positifs. Sur ce dernier volet, l’agriculture régénératrice est une excellente méthode pour contribuer à l’augmentation des moyens de subsistance des populations agricoles. Les moyens de subsistance englobent aussi bien les capacités humaines que les ressources financières et naturelles nécessaires à la subsistance.

En zones tempérées, et notamment en Europe, les agriculteurs sont confrontés à plusieurs phénomènes menant à une crise généralisée du secteur : appauvrissement de la classe agricole, déconsidération du monde paysan et non-pérennité des exploitations, pourtant en première ligne face à la menace du changement climatique. De nombreux agriculteurs demandent à optimiser leurs pratiques pour les adapter aux enjeux actuels et futurs (appauvrissement des sols, perte de rendements, etc.), mais n’ont tout simplement pas les capacités financières de le faire. Nous sommes convaincus que le recul des normes écologiques n’est pas une solution de long terme. En effet, ce ne sont pas les règlementations qui réduiront la production alimentaire, mais bien les effets directs des événements climatiques à venir (sécheresses, augmentation des températures, inondations, etc.). La méthode de Reforest’Action consiste à nouer des liens avec des entreprises partenaires désireuses de financer la transition agroécologique de leurs producteurs et fournisseurs. Ce modèle est une réponse pragmatique au manque de moyens financiers des agriculteurs pour s’adapter aux exigences environnementales, et un moyen efficace de leur donner les moyens de participer à la transition du secteur agricole.

En zones tropicales, il s’agit tout d’abord de répondre aux besoins humains primaires. Dans de nombreux cas, les communautés locales dépendent uniquement de l’agriculture pour leur sécurité alimentaire. Parce ces régions subissent déjà les conséquences du changement climatique, l’adaptation des pratiques agricoles, souvent non compatibles avec les enjeux, est devenue une nécessité. Le modèle proposé par Reforest’Action à ses partenaires vise l’amélioration des conditions de vie des agriculteurs et de leur famille, via notamment la production de produits alternatifs, dérivés des arbres plantés en agroforesterie. En plus de participer à l’augmentation de la sécurité alimentaire, la génération de revenus alternatifs est permise via la vente de ces produits issus d’une agriculture durable. Un soutien à l’accès au marché peut être inclus dans les prestations du projet, avec l’objectif de garantir un prix équitable pour les agriculteurs.

En Inde, contribuer au bien-être des producteurs de coton

Depuis 2022, Reforest’Action mène un projet d’agriculture régénératrice intégré aux filières textiles de production de coton, dans l’État indien de l’Odisha. En 2024, la phase pilote amorcera le volet social du projet, complémentaire au volet agricole et faisant partie intégrante des propositions de design. L’idée est d’expérimenter le concept de « Clean & Green Villages », dans une région reculée souffrant de conditions sanitaires particulièrement précaires et difficiles. Dix villages seront ainsi sélectionnés en tant que « modèles » pour mettre en œuvre le programme sur une période de 2 ans. La proposition se concentre sur l'amélioration des connaissances et des compétences des communautés autour de thématiques comprenant la promotion de la santé et de l’hygiène, l’utilisation de l’énergie, le recyclage des déchets agricoles et la production de composte. Dans cette démarche, les décisions collectives seront privilégiées.

Concrètement, cette proposition inclut la dispensation de sessions de sensibilisation et de formation à destination de Comités de Gestion Villageois (CGV) : la production de semis, l’entretien des arbres agroforestiers, la protection des cultures ou encore la gestion efficace de l'eau seront abordés. Ces comités deviendront ensuite les ambassadeurs de l’agriculture régénératrice auprès de la communauté. En parallèle, le projet garantira l’accès à des pratiques améliorées telles que les technologies d'irrigation durable, qui réduisent la charge de travail des agriculteurs. Le projet met en outre l’emphase sur l’autonomisation des groupes de femmes. Pour ce faire, des initiatives féminines seront mises en place dans le cadre de la création des pépinières. Dans un second temps, la valeur ajoutée du projet portera sur l'aide fournie pour la commercialisation et la transformation des produits dérivés des arbres intégrés aux champs de coton.

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Producteurs de coton d'une coopérative locale, État de l'Odisha, Inde
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Réunion avec les agriculteurs de la coopérative partenaire

Afin d’assurer la résilience des agroécosystèmes et leur stabilité à long terme, Reforest’Action développe des outils de mesure d’impact applicables aux projets d’agriculture régénératrice. Pendant les cinq années qui suivent la mise en place d’un projet, les communautés agricoles sont accompagnées par Reforest’Action pour assurer l’entretien et la bonne santé de l’agroécosystème ainsi créé. Au-delà de ce délai, des outils de mesure d’impacts sont activés pour monitorer les indicateurs clés définis en amont, incluant les bénéfices socio-économiques du projet sur le long terme. Les populations sont ainsi constamment intégrées au cycle de vie du projet.